by Laurent • 7 January 2003 • Non classé
Avec le premier tome de son Histoire du comic book, des origines à 1954, Jean-Paul Jennequin offre un livre qui s’impose d’entrée comme une référence incontournable sur la bande dessinée américaine. A la fois introduction et plongée vertigineuse dans un monde bigarré (les illustrations du livre sont, en ce sens, particulièrement bien choisies), l’opus est intéressant à plus d’un titre. D’abord car il reprend de façon méthodique et chronologique l’histoire des fascicules que sont les comic books et ensuite car il dresse un inventaire fascinant des différents genres et personnages auquel le format de publication s’est intéressé.
Dans un premier temps, on suit donc la création même du comic book et le passage des bandes dessinées des journaux vers leur propre magazine. C’est un phénomène intéressant que l’apparition d’un format de publication et Jennequin insiste bien sur le fait que cette nouveauté est synonyme d’errances, d’expérimentations, mais surtout de créativité extrême. Certes, les débuts sont difficiles et la création n’est guère encouragées, mais l’apparition de Superman va remédier à tout cela. Dorénavant, les reprises des strips des quotidiens ne suffiront plus et la déferlante de super-héros (bien qu’ils ne soient pas encore appelés comme cela) copiés sur l’homme de fer va suivre. L’auteur se lance alors dans une énumération hallucinante de tous les personnages créés de 1939 à 1942, certains étant ridicules au plus haut point.
C’est avec la période suivante que le livre prend une autre ampleur car Jennequin y traite de la diversification des genres et piétine quelques idées reçues. Non, les comic books ne se résument pas aux histoires de super-héros et ont vécu des périodes où ces derniers étaient même minoritaires. Et non, les lecteurs de bandes dessinées ne sont pas que des garçons, le nombre de titres de romance comics est là pour le prouver.
Mais, ce qui prédomine et imprègne toute cette Histoire du comic book est l’idée que ce médium a toujours été populaire et lu par le plus grand nombre. A une époque où la télévision n’existe pas ou n’en est qu’à ses premiers balbutiements, cette forme de divertissement revêt une grande importance dans la vie quotidienne des américains. Les bandes dessinées sont en vente chez une multitude de détaillants et de kiosques alors qu’aujourd’hui ce sont majoritairement les librairies spécialisés qui les distribuent. C’est peut-être ce côté populaire, supplanté par la télévision et surtout les jeux vidéos, qui a manqué par la suite et qui cause la situation actuelle des comics (baisse des ventes et crise du lectorat)
En mêlant l’Histoire (la seconde guerre mondiale) et la sociologie à l’évocation de l’évolution d’un format éditorial, Jean-Paul Jennequin réussi son coup. Il offre un livre qui est à la fois une mine d’information et une passionnante évocation d’un médium populaire qui a mis des étincelles dans les yeux de millions de gamins. Nul doute que Jennequin a fait partie de ceux-là.