Hantise

Nous hantons nos demeures. Cloîtrés dans nos propres espaces, nous errons d’une pièce à l’autre. Chez certains, les assiettes volent. Poltergeists. Avant les pluies de pierres.
Je suis sans doute mieux armé. Je hantais déjà le haut-château au quotidien, quand les autres s’en allaient. J’y travaillais. Je gardais le fort (avec Miles). Et cet endroit choisi dans ce but y est sans doute adapté. C’est un lieu de vie, mais aussi celui où je bosse. Il m’y fallait un coin à moi, un espace extérieur, de la nature proche, de la place pour les livres, des “détails” qui se révèlent salvateurs durant cette période. L’on n’y rentre pas que pour dormir.

Le travail a tout de même changé. Parce que rien n’est comme avant. Parce qu’il faut jouer au prof, naviguer dans des problèmes quotidients inédits et recentrés sur les besoins de base et le foyer immédiat. Nous n’allons plus nulle part, plus rien ne vient à nous. Plus personne. Mais la maison n’est jamais vide. Et le travail s’en ressent. On s’adapte. On louvoie. On va y arriver. Avons-nous le choix ?

Je lis, toutefois. Des tas de choses en parallèle. Le fouillis n’est pas que dans la tête. Henry Miller, Montaigne, Alastair Reynolds, Peter Bagge, Gareth L. Powell, Daniel Marguerat, Jack London. Et je crois avoir réécouté l’intégrale de Miles Davis jusqu’à 1974 au fil de la semaine dernière.

Et je me découvre survivaliste culturel. Marie Kondo avait tort. Ou peut-être pas. Puisqu’il ne fallait garder que ce dont on tirait du plaisir, le conseil a été bien suivi, ici. La maison est remplie.

Il n’y a pas de stratégies pour l’avenir. Nous verrons bien. Les projets continuent leur développement, l’enthousiasme reviendra. D’ici là, le recentrage continue. Des idées germent. Et les amis ne sont jamais loin. On se parle, on s’écrit, on se voie.
Nous hantons nos demeures, mais ne sommes pas encore des fantômes.