Multiplicité
by Laurent • 26 May 2015 • Non classé • 0 Comments
Avec tous ces travaux de traductions et ce gros scénario de bédé qui me bouffe le cerveau, je n’avais pas écrit de prose depuis plus d’un mois. Je viens de recommencer une nouvelle qui me hante depuis pas mal de temps et je retrouve un plaisir qui me manquait. Celui de l’histoire (relativement courte), de la construction d’un récit dans un cadre et un temps donné, avec des personnages qui devront fonctionner et exister sans pouvoir être développés sur des dizaines et des dizaines de ligne. Le simple plaisir primordial de raconter une histoire, comme au coin du feu.
Je ne crois que je ne pourrais pas me passer de ces changements d’état, de position, de façon de faire. J’ai besoin d’alterner et de passer d’un scénario de bande dessinée à l’écriture d’un roman ou d’un texte plus court, sans parler des respirations que sont parfois les traductions dans les périodes où la création pure est plus compliqués.
Je croise, surtout sur facebook, des scénaristes qui semblent ne vivre que pour le scénario, pour la belle image, pour la bande dessinée, quoi. Et qui ne font que ça. Et c’est sans doute la clé. Pour réussir vraiment à ne faire que de la bande dessinée, il faudra vraiment que j’y passe tout mon temps, que j’y consacre toute mon énergie. Temps et énergie qui, j’ai l’impression, sont aussi consacrés à des tâches annexes et souvent frustrantes lorsqu’il s’agit du neuvième art (recherche du bon dessinateur pour le bon projet, montage de dossier etc).
Même si je ne pourrais sans doute plus me passer de la joie de la collaboration avec un dessinateur qui va dans le même sens que moi, je crois que je ne pourrais sans doute pas m’en contenter. J’ai besoin de la liberté que m’offre la prose.
Ecrire des nouvelles n’a aucun intérêt commercial, si je réfléchis en purs termes de “carrière”. Mais j’aime ça.
Mes envies diverses me desservent sans doute, dans un certain sens. Pour réussir dans le roman, il faudrait sans doute ne se consacrer qu’à la prose. Idem dans la bd.
Mais quand je vois ces scénaristes parler, respirer, vivre bd, une question me vient immédiatement à l’esprit : n’ont-ils jamais eu envie d’écrire autre chose que des scénarios de bd, de s’essayer au roman, peut-être, ou au moins à une autre façon de raconter une histoire, un autre médium ?
Sans doute pas. Et tant mieux pour eux.
Je pourrais aussi inverser la démonstration et parler des auteurs qui ne cherchent pas à faire de la bd, mais vous avez compris le principe. L’exemple des scénaristes purs m’interpelle tout de même davantage car ces artistes n’offrent jamais, s’ils ne sont pas dessinateurs, un travail qui leur appartient à eux-seuls, qui les représentent entièrement. Il y a toujours le prisme d’un dessinateur et le résultat d’une collaboration. Je me demande comment ces scénaristes ressentent le fait de ne jamais rien publier qui ne soit le produit de leur seul travail, sans intermédiaire, leur oeuvre à eux seuls. J’imagine qu’ils le vivent très bien. Et si je n’étais pas satisfait de ce que je fait, je serais presque jaloux.
Ils ne s’éparpillent pas comme je le fais probablement (et je suis loin d’être unique dans ce cas), à courir plusieurs lièvres à la fois.
Ah, au fait, je vous ai dit que je venais d’écrire un scénario de long-métrage ?