This Charming man
by Laurent • 11 October 2010 • Non classé
L’hiver est presque fini, mais il fait toujours froid le soir. On marche vite, en allumant des clopes, en jouant aux écervelées comme si nous étions les reines de la nuit, dans un taxi new-yorkais en route pour un vernissage de Raymond Pettibon. Nous sommes jeunes, belles et la fumée qui sort de nos poumons monte vers les cieux pour aller titiller les démentielles narines des dieux barbus qui veillent sur la nuit. Il nous arrive parfois de ne pas échanger un mot pendant le trajet. Soit parce que nous avons épuisé tous nos sujets de conversation soit car, par un accord tacite, nous avons envie de faire des réserves pour plus tard, d’emmagasiner ce qui fera sans doute, dans l’avenir, l’essence de nos dix-sept ans. Marcher dans la ville chloroformée, sous les lampadaires endormis, ignorer les stades et les maisons bourgeoises, s’accaparer le trottoir comme le tapis rouge de notre jeunesse en fredonnant des airs américains.
Se sentir immortelles pour un temps.