• Genèse: Kafka à Paris de Xavier Mauméjean

    by  • 21 September 2015 • Genèse • 2 Comments

    Aujourd’hui, dans Genèse, Xavier Mauméjean nous raconte d’où lui est venue l’idée de faire déambuler Franz Kafka et Max Brod dans le Paris de 1911.

    Xavier Mauméjean:

    Il m’arrive de temps à autre qu’une idée de roman s’impose d’un coup. La première fois, à Noël, des amis m’avaient offert un livre sur l’architecture new-yorkaise. Une simple mention au parc d’attractions de Coney Island et sa compagnie de pompiers nains, m’a valu une immersion de huit ans qui a donné Lilliputia.
    Pour Kafka à Paris, c’est la découverte d’un projet de guide touristique par Franz Kafka et Max Brod, lors de leur second séjour dans notre capitale. En fait, une plaisanterie que reprenaient de temps à autre les deux apprentis écrivains. Comment ne pas trop passer de temps en visites ? Que faire les jours de pluie ?
    Cela m’a intrigué et amusé, j’ai donc fait quelques recherches sur Paris à cette époque-là, pour me rendre compte très vite que les deux zigotos arrivent en gare de l’Est le lendemain de l’arrestation d’Apollinaire dans le cadre de l’enquête sur le vol de la Joconde. C’est aussi la semaine où les Futuristes débarquent de Milan, mais là c’était trop. La vie peut se permettre d’écrire ce qu’elle veut, sans souci d’éditeurs et de lecteurs.
    Cela devenait intéressant d’imaginer nos deux jeunes intellectuels, nourris à la mystique de Prague, confrontés aux abattoirs et à la gouaille des putains, à la crasse, au gros vin, à une furieuse envie de vivre. Forcément, cela agirait sur eux, déterminerait peut-être leur futur.
    Bon. Le problème est que j’étais en train d’écrire un roman sur Freud et Houdini à New-York en 1909, et qu’il était déjà bien avancé. D’un autre côté, les deux projets étaient à ce point symétriques – deux Juifs originaires de l’empire austro-hongrois qui se retrouvent dans une mégalopole – que la substitution était envisageable. Un escamotage, comme dirait un magicien de scène.
    Mais quoi écrire, sinon le fameux guide ? Il fallait donc que le récit soit linéaire et découpé en chapitres simples, comme autant d’entrées : «À la gare », «À l’hôtel », « Au Louvre », « Au bordel » etc.
    Pour le style, j’ai voulu coller au plus près de la langue, et me suis donc immergé dans les romans de Georges Duhamel, Léon Frapié, Georges Blondel, mais aussi Antoine Blondin, René Fallet, etc. pour trouver le ton et les expressions, mais sans en faire trop. Pas question de tomber dans l’argot académique façon Pierre Perret.
    En gros, voilà. C’était aussi l’occasion d’écrire une aventure de Spirou (Franz) et Fantasio (Max) et de rendre hommage au burlesque. Heureux hasard, durant la rédaction, je suis tombé sur cette citation de Walter Benjamin, écrite à Paris : « Concernant son amitié avec Brod, j’ai l’impression de m’approcher de la vérité si je dis que Kafka était un Laurel qui se serait trouvé dans la pénible obligation de se chercher son Hardy.»
    Je voulais écrire un livre drôle, on me dit souvent qu’il l’est. Tant mieux, je crois que l’époque a besoin de rire.

    Kafka à Paris, de Xavier Mauméjean est disponible aux éditions Alma.

    Dans Genèse, un écrivain revient sur la création de son dernier livre. Auteurs, éditeurs, pour participer, vous pouvez me contacter: laurent@laurentqueyssi.fr

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