Ideaspace gentlemen’s club
by Laurent • 14 March 2011 • Non classé
– Le voyageur des siècles, de Noël Noël
– Le jeune homme, la mort et le temps, de Richard Matheson,
– Le temps n’est rien, d’Audrey Niffenegger
Un paysage du temps est assez passionnant parce qu’on n’y fait voyager que des tachyons vers le passé. Des chercheurs d’un 1998 où le monde est au bord du gouffre (le bouquin date du début des années 80) envoient des messages en morse, via les tachyons, en 1963. La narration alterne entre les deux dates et le moment pivot est lorsqu’un des hommes de 1998 va, dans une banque ouvrir un coffre fermé depuis trente cinq et y découvre un papier jaune sur lequel est inscrit: « La Jolla message reçu ». Ce simple petit bout de papier est la preuve que le voyage dans le temps fonctionne véritablement. Et c’est sans doute plus réaliste qu’un terminator revenant vers le passé. Si ça devait arriver, ça ressemblerait probablement à ça. Un petit bout de papier laissé quelque part.
D’autre part, Benford introduit un paradoxe temporel, mais le résout d’une manière si élégante et scientifique que ça marche parfaitement. Je suis en général friand des histoires de voyages dans le temps bouclées, n’introduisant pas d’univers alternatifs (même si la théorie scientifique penche pour cette hypothèse), mais lorsqu’ils sont bien faits, ce qui est rare, ces récits peuvent offrir de formidables réflexions sur le temps et ses contraintes…
Tu as déjà entendu parler de John Titor?
Puisque tu parles de traduction de bédé anglaise, je ne sais pas si celle du Moore est bonne, mais j’ai parlé de traduction récemment sur mon blog. Je me cite “Dans les deux ou trois derniers albums traduits que j’ai lu (tiens, même les Dallas Barr comprennent des anglicismes assez indignes), j’ai toujours trouvé au moins une page incompréhensible, ou de l’anglais transparent, ou une confusion, bref, des défauts qui me poussent de plus en plus à acheter tout en anglais. Soutenez les traductions, disent les forumers dans l’espoir de pouvoir lire tel ou tel titre. Je me demande si ça vaut vraiment le coup de les lire dans ces conditions…
Qu’il est loin le temps où Manchette traduisait Watchmen.“
Du coup, je n’ai pas pris l’objet en question. Je suis plus dans ma phase Morrison et je viens, comme par hasard, de relire le volume des Invisibles où il y a chouette voyage dans le temps dont le symbole n’est pas un papier jaune dans un coffre, mais un origami qu’un chercheur japonais renvoie à son arrière-grand-père.
Outre les histoires d’amour, il y a pas mal d’histoires qui se fondent sur la relation filiale et/ou le retour dans le corps que l’on avait à dix-sept ans (il y a une bédé de Taniguchi sur ces prémisses). Des thèmes assez universels finalement. Les erreurs passés, revoir ses parents morts.
Et puis il y a ce truc de déglinguo, Le Temps du twist…
Je crois qu’on pourrait faire une histoire parallèle de la chute de l’Empire américain en se servant de celle des comic-books comme métaphore. Ca sent déjà la fin depuis belle lurette, mais la mort comme artifice narratif, ça commence à faire grincer les dents des fanboys qui restent encore.
Et il y en a bien encore quelques-uns. Je le sais, je reviens d’Angoulême. Ce sont les gars qui se sont levés dès que Charlie Adlard a cessé de parler lors de sa rencontre pour aller lui quémander un autographe sur un des nombreux volumes de Walking Dead. Remarque, c’est pas comme si le mec avait eu des choses intéressantes à dire avant. C’est qu’un dessinateur, faut dire (et là, je me grille avec 50% des talents français qui ne voudront plus jamais faire de bédé avec moi).
Ceci dit, en y repensant, la boîte de Pandore, c’est Doyle qui l’ a ouverte en faisant revenir, l’autre, là, Sherlock Holmes.
D’ailleurs, tu as vu la nouvelle série avec le personnage modernisé?
Les super-héros aussi, comme leurs ancêtres mythologiques ou antiques ont d’abord mangé sur le dos de leurs « origines » (il suffit de regarder les adaptations ciné pour voir que la mode se perpétue) puis est venu le temps d’aller à l’autre bout (là, c’est sans doute Moore et son Whatever happened to the man of tomorrow ? qui a lancé les choses (mais quelle mode n’a-t-il pas lancé à son corps défendant) et peut-être aussi le superbe recueil de la mort de Captain Marvel, indépassable et non dépassé).
Quand à la simplicité du voyage, ce site montre bien que la carte orange existe aux US: http://bullyscomics.blogspot.com/2011/01/again-but-that-trick-never-works.html
Le format comics est déjà mort. Sa renaissance passe par les recueils, ce qu’on appelle les Trade paperback que l’on trouve dans les librairies généralistes. Les histoires ne sont plus pensées pour être conclues dans les 22 pages d’un fascicule, mais pour s’étaler sur plusieurs et l’intrigue ne prend toute sa saveur que lue dans un recueil. Les créateurs sont déjà passés à autre chose, marché oblige.
Les comics se réinventent un peu en bédé franco-belge. Reste le problème de la toute puissance des super-héros (comme si en France il n’y avait qu’un genre qui dominait 95% des ventes). Le réservoir à cash qu’est Hollywood maintient en vie artificielle ces personnages le plus souvent ridicules réservés à la base aux enfants et lus uniquement par des adultes (avec le décalage de situation et la médiocrité qui en résulte).
La bédé américaine se portera peut-être mieux créativement le jour où il n’y aura plus de production de fascicule. Ou pas.
Tu as lu The unwritten?
Un truc qui m’avait fasciné, dans le même ordre, c’était l’histoire de Christopher Milne, le gamin qui a “inventé” Winnie L’Ourson et ses potes http://marshotel.blogspot.com/2010/11/unwritten-winnie-lourson.html
Il estimait qu’on lui avait volé son enfance. C’est hyper triste, mais quelle histoire magnifique cela fait. C’est du vampirisme psychique adapté aux peluches…
Pas mal de charges pour un sujet de sa Majesté…